| Natalya |
Harvest, 7 Aôut 2526
Comme à chaque fois qu'elle allait en ville faire de gros achats pour la ferme, Natalya n'était pas rassurée : une charrette à cheval, ce qu'il y avait de plus pratique pour emporter une telle cargaison de graines et d'outils divers, était aussi une cible facile et évidente pour les groupes de racketteurs qui sillonnaient les routes. Son mari avait trop à faire et n'avait pas pu l'accompagner, cette fois. Aussi, pour contrer la malchance, elle serrait un vieux fusil contre sa poitrine.
Ce qui la rassurait et l'intriguait en même temps, c'était le nombre de véhicules qu'elle croisait. Tant de monde en semaine et en journée, c'était plutôt inhabituel ! Les citadins ne travaillaient donc plus ? Et il y avait visiblement toutes les couches de la société... Ca allait de la vieille carlingue à 6 roues, jusqu'à la dernière moto anti-grav qu'elle ne pourrait jamais s'acheter. Ca ressemblait à un exode... De temps en temps, il y en avait même pour lui faire signe de faire demi-tour. Intriguée, autant qu'un peu rassurée de n'être pas vraiment seule, elle continuait sur la route cahoteuse et brulée par le soleil.
Arrivée à proximité de la ville, sa sourde inquiétude était toujours là, alors qu'habituellement, elle se sentait rassurée. Bientôt, sa cargaison n'aurait de valeur que pour des fermiers, la mettant à l'abri des voleurs... contrairement à la petite fortune qu'elle transportait.
Mais pas aujourd'hui, quelque chose clochait.
Les gens qu'elle voyait étaient tous en train de faire des préparatifs fébriles pour quitter la ville, et rien de l'activité normale n'animait les rues. Arrivée au hangar du marchand de graines, elle vit le même spectacle. Portes fermées et grilles baissées, pas d'employés en vue, et Gregor, le patron qui chargeait son air-pickup. Pas un ami, mais presque. En la voyant, il eu l'air affolé et inquiet.
Après un instant d'hésitation, Gregor s'interrompit pour venir la voir, la peur dans les yeux :
« Pourquoi tu es là Natalya ? Tu ne sais donc pas ce qu'il se passe ? Le monde devient fou... Plusieurs villes ne donnent plus de nouvelles, et d'autres semblent prises de folies, comme c'est arrivé déjà pour les grosses planètes... Les gens fuient, ils veulent se cacher avant que ... »
L'homme s'interrompit pour plaquer les mains sur ses oreilles avec une horrible grimace. Dans la rue, une dizaine d'autres personnes en faisait autant. Les autres les regardaient, l'air stupéfait. Qu'est-ce qui leur prenait ? La réponse ne se fit pas attendre, et Gregor se jeta sur Natalya, une grimace de douleur et une folie furieuse dans les yeux.
Réflexe heureux, Natalya déchargea son arme sur lui en hurlant de peur, stopant net la charge de Gregor.
En détachant la monture du chariot, elle regardait autour d'elle... La ville était prise de folie, et tout le monde se battait, s'entretuait, la plupart semblait totalement fous et la rue était déjà un véritable abattoir... Seule la vitesse de son cheval pourrait la sauver, et sa monture en semblait bien consciente, elle piaffait d'impatience...
Une heure plus tard, et plusieurs balles en moins dans son fusil, Natalya arrivait enfin chez elle, échevelée et pleine de sang.
Oubliant l'air ahuri de son mari, elle se jeta dans ses bras, ivre de joie d'être en vie, de soulagement.
Mais quand il l'écarta d'elle pour mieux la voir, lui demandait ce qu'il se passait, elle sentit une froide colère qui partait de ses entrailles pour envahir tout son être...
En guise de réponse, elle se jeta à nouveau dans les bras, plantant ses dents dans l'oreille pour lui arracher, recommençant dans la gorge, encore et encore ...
Ensuite, poussée par une sorte d'instinct, elle repartit vers la ville, à pied, rejoindre son nouveau peuple...
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